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11 avril 2009 6 11 /04 /avril /2009 17:58
"Si Jonas m'était conté"
Nouvelle version étoffée par des commentaires


 
Voir : "LE LIVRE DE JONAS" : INTRODUCTION A UNE REECRITURE COMMENTEE 
              "LE LIVRE DE JONAS" : LA FUITE DE JONAS ET LA TEMPETE 
              "LE LIVRE DE JONAS" : II - JONAS, AVALE PAR LE GRAND POISSON SE TOURNE VERS DIEU 
              "LE LIVRE DE JONAS" : III - LA MISSION DE JONAS


IV  - L’illumination de Jonas



                  Ah ! Devant le soudain retournement des habitants de Ninive, voilà que Jonas est pris d’un grand dépit ! Sa colère s’enflamme. Quoi ! Les malheurs ne s’abattent pas sur cette ville corrompue ! Lui, prophète de malheur, se sent ridiculisé ! Les gens qu’il sommet de se convertir le font ! Il est pris en tenaille dans ses désirs contradictoires. Les fautes ne doivent-elles pas être expiées par les souffrances ? Le fiel monte sur ses lèvres et il se retourne contre la générosité de la providence. Lui, il n’arrive plus à sublimer ses sentiments devant la surprise que lui cause les événements. Subtilement, un poison s’infiltre encore dans ses veines alors qu’il s’est présenté au peuple de Ninive sous son meilleur jour. Il ne peut continuer à regarder la vérité en face. La vie est au service de l’homme ; c’est une énergie d’amour toute compatissante, prompte à menacer et à châtier si nécessaire, mais encore plus prompte à prodiguer l’abondance de la joie, de la prospérité, du bonheur dès que les cœurs humains s’ouvrent sincèrement à elle. Rien de souillé, de trouble, cependant, ne doit rester dans l’intime des êtres pour cela. C’est du moins ce que suggèrent certaines traductions

Jonas brûle, il bout intérieurement, médusé par l’inattendu, et sa colère grandit ; il faut qu’elle sorte, qu’elle s’exprime, il faut qu’il la traverse pour grandir encore.

              - “Ah ! Je savais cela lorsque j’étais encore chez moi ? C’est pourquoi je me suis enfui à Tarsis ; je savais en effet que, si j’allais là-bas, à Ninive, la colère de la destruction ne s’abattrait pas sur les humains et que ces gens seraient alors soulager de leur mal. J’ai fui la clémence et la miséricorde que le ciel a pour eux ! A quoi bon de servir au péril de ma vie si la grâce touche ceux qui n’ont couru aucun risque ?”

              Jonas savait cela en pensée mais ne l’avait pas vécu, et devant le fait, il se révolte. Au paroxysme de son ressentiment, il désir mourir ! ”

             - “Prends ma vie ! crie-t-il vers le ciel, mieux vaut mourir que vivre !

             Quel aveuglement ! Si les Ninivites n’avaient pas amendé leur conduite, on pourrait comprendre son désespoir ! Mais là ?

              Souvent, les textes anciens qui ont plusieurs niveaux de lecture ne sont traduits que dans le sens littéral. Alors qu’un esprit éclairé va entendre autrement ! et c’est alors une ouverture incommensurable sur le Tout Autre…

              A son Dieu, Jonas crie :

              - “Prends mon âme !”

              Non pas pour mourir selon les notions terrestres, non !

              - “Epouse-moi ! Que mon âme se fonde en Toi ! Reçois-moi dans Ta Demeure ! Que je meurs à tout ce qui n’est pas Toi !”

              Non plus cette vie illusoire dans ce corps mortel ! Non, la Vie pour une renaissance éternelle…

             Il est justement enflammé. Il va et s’installe à l’Orient de la ville, pour se tourner ainsi dans la direction de cette nouvelle naissance, ce feu qui l’habite. Il se construit une cabane de roseaux et s’assied là, à l’ombre, pour se concentrer. C’est sous des cabanes que, durant sept jours son peuple habita, à sa sortie d’Egypte, et l’ombre sous lequel Jonas s’abrite, c’est la foi. Il lui faudrait atteindre à l’absolu dépouillement pour unifier les oppositions qu’il porte encore, et surtout cet écartèlement entre l’amour et la crainte qui l’habitent. Cette demeure provisoire, c’est un lieu de purification qui se construit en branches de cédratier auquel est associée l’eau, en branches de palmier dattier, c’est le feu ; en branches de myrte qui, par leur odeur, représentent l’air et en branches de saule de rivière, eux pour terre (1). Ainsi, consciemment, cette cabane symbolise la maîtrise des quatre éléments, produits d’une unique substance.


              Alors, durant la nuit, pousse un ricin dont les feuilles palmées
 procurent une ombre fraîche. La graine de ricin a des vertus purgatives !
L’arbre est commun en ces pays. 


            Comme dans l’intestin du gros poisson, à nouveau,
Jonas, doit se débarrasser de tous ses excréments.
Mais les quatre arbres qui construisent la cabane,
construisent aussi le corps de gloire de Jonas.
        « La branche de palmier figure la colonne vertébrale dominée par le cerveau,...
le cédrat figure le cœur,... les myrtes figurent les yeux,…
 et les saules, les lèvres et la bouche. (1) » 
             Plus de penser personnelles pour être penser par la puissance créatrice !
Plus de cœur sentimental, mais l’Amour de l’amour au Cœur du cœur de son cœur !
Les yeux de chair deviennent l’Œil de la Connaissance, le troisième Œil,
et la bouche ne parle plus pour ne rien dire mais ne profère que les Dits de la Vie,
les paroles justement inspirées.

             Jonas reçoit une grâce insigne, qu’il n’avait pas même demandée, celle d’être dans l’ombre du tout puissant que symbolise ce ricin poussé en une nuit. Il est adombré, protéger de toute brisure, il est délivré, sauvé, libéré…

             C’est comme une montée d’énergie depuis le Luz subtil situé au bas de la colonne vertébrale, dans le sacrum, le lieu sacré. En un premier temps, cette énergie se manifeste naturellement en partant du chakra racine appelé par les yogis Mûlâdhara. Cette force vitale est nommée Luz dans la tradition hébraïque : « ce qui est caché, couvert, enveloppé, silencieux, secret » ; elle est située « vers l’extrêmité de la colonne vertébrale ». « Comme le noyau contient le germe, et comme l’os contient la moelle, ce Luz contient les éléments virtuels nécessaires à la restauration de l’être… » « Le Luz, étant impérissable, est dans l’être humain, le “noyau d’immortalité”, comme le lieu qui est désigné par le même nom est le “séjour d’immortalité”… (2) »

             Jonas est dans la félicité, dans l’extase, au septième ciel ! Il entre en Samadhi dirait-on en Orient.

            Il est réjoui ! Cette grâce, elle n’est pas née de son mérite ! Voilà qu’après avoir traversée les illusions qu’il générait par lui-même, Jonas doit traverser les illusions qui viennent du ciel cette fois. Les grâces sont encore des pièges, ceux de “Dieu” quand ceux du “Diable” ont échoué (3) ! Ephémères, elles se dissolvent et disparaissent comme elles sont apparues, sans causes décelables humainement. Le diable, c’est l’obstacle et le piège de Dieu est de masquer l’unité du multiple. Jonas va-t-il, dans un dernier sursaut, vouloir sauver sa peau, se cramponner à la forme de son moi, ou bien traverser la mue qui s’ébauche ?


           La fable nous dit que, dans la nuit, des larves de capricorne creusèrent le bois du ricin. Le matin, il est mort, desséché.


Cet arbre à l’ombre si bénéfique était encore un voile entre Jonas et la source de vie,
 un voile entre le visible et l’invisible, le terrestre et le célestiel.
Il est tombé en poussière, il s’est volatilisé.
Une porte s’ouvre pour un nouveau passage,
 un passage de la matière terre à la Matière première universelle,
le passage de l’œuvre au blanc à l’œuvre au rouge, nous précise l’alchimie.

            Une vive lueur apparaît au levant, comme à son lever l’éclat du soleil… mais ce n’est pas le lever du soleil de notre terre. Jonas se doit maintenant, au-delà de toute illusion, de regarder le Soleil de la vérité en face. L’extase, ce dernier piège du Bien-Aimé, touche à sa fin. La situation éphémère se dissipe sous l’effet du Souffle silencieux de l’Esprit, un fort vent venu de l’est, du couchant de la mort que Jonas ne connaîtra plus. Ce Souffle défait la dernière illusion…

           Comme les vers du capricorne ont frappé à mort le ricin qui lui portait ombrage, le Soleil frappe durement Jonas afin qu’il accomplisse cette fois le passage sans aide extérieure. Face à cette intensité de lumière, Jonas s’enveloppe la tête, il s’enveloppe ainsi pour revenir à l’état où il était avant que le ricin n’apparaisse. Il lui faut reculer pour mieux sauter, afin de préparer ses forces pour s’élever sans aide, seul, par lui-même.

           Vers l’intime de son être, de nouveau, il crie :

            - “Ma mort est préférable à la vie ! ”

            Cette fois, il ne s’adresse plus à ce qui serait un Dieu extérieur à lui ! Non ! Les degrés inférieurs de la vie n’ont plus de prises sur lui ; il aspire à l’union mystique avec son Soi essentiel. C’est cela qui est vécu comme une mort par les forces inférieures qui n’ont aucun pouvoir sur celles d’en haut. L’âme terrestre se dissout dans l’Océan d’Amour qu’est l’Energie qui crée toutes formes. La mort de l’âme charnelle, c’est la résurrection, le prix à payer pour l’accès à la Vie au-delà du temps terrestre.

             Le bienfait que lui procurait l’ombre du ricin n’est plus ; il ne peut plus maintenant que compter sur ses seules forces, pour le reproduire. Il brûle d’un désir si intense qu’il ne recule pas devant la mort de ce qui doit mourir pour que vive ce qui seul mérite en lui de vivre.

L’inspiration monte ; il se parle à lui-même, unifiant son Moi transcendant et le moi inférieur de son individualité terrestre :

             - “Tu as joui de l’ombre du ricin que tu n’as pas planté et qui a poussé en une nuit, dans la nuit noire de ton âme. Tu ne t’es pas élevé par toi-même. Pour jouir de cette extase dans laquelle tu te trouvais, tu n’as eu aucun mérite. Est-ce toi qui as ouvert la porte ? Cela n’est qu’un avant goût… Il te faut maintenant, cette porte, l’ouvrir par toi-même. Montre la vaillance de tes forces intérieures, gagne ce combat seul. Soit victorieux ; que ta volonté soit le vouloir de la vie ! Certes, nul ne peut s’accoucher seul, mais ce n’est pas la sage-femme qui accouche ! Accouche-toi de toi-même ! Oui, mon illumination n’a été qu’un rêve d’une nuit qui m’a semblée éternelle ! Ce qui est né dans la nuit s’est évanoui avant la levée du jour.

            Ninive, ce sont tous les êtres, fruits de la création ; c’est l’unité d’une multitude. Certes, que la vie leur soit clémente et miséricordieuse puisqu’ils ont réformé leur conduite. Il leur faut cependant retrouver au tréfonds d’eux-mêmes le germe d’immortalité, cet embryon de l’Immortel qui les fera authentiquement humains. Tant qu’ils n’auront pas retrouvé cette pierre cachée, cette fontaine de jouvence, ils resteront cependant dans l’illusion d’un multiple dont ils ne perçoivent pas l’unité. Tout ce qui s’édifie dans cette illusion se dissipe tôt ou tard en fumée ! ”

            Dans Ninive “il y a une multiplication de douze myriades d’Adam, qui ne connaît pas sa droite de sa gauche, ainsi qu’une foule d’animaux ! (4)”.

             Relisez attentivement cette phrase ! Douze myriades d’Adam, c’est une unité qui ne connaît pas… Les traducteurs ont pensé à une faute d’accord du copiste ! Mais non ! Il n’y a que l’Unique-ce-qui-est ! Une unité plurielle, un multiple unitif. Chacun traduit avec le niveau de conscience auquel il est parvenu…

             Dans le monde terrestre, la lumière se dégrade inévitablement par les désunions, les paroles vides et vaines, les désirs, les peurs qui en découlent, le bruit, la dispersion d’un mental ratiocinant,..

             Depuis l’Adam primordial androgyne un et pluriel, l’âme humaine s’est dégradée. Sa séparation en homme et femme en a fait un Homme Célestiel vivant ce qui fut appelé l’Âge d’Or au Jardin d’Eden. Ce jardin qui est un état d’être intérieur ! Il s’en est exclut en mangeant le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, il est devenu l’homme spirituel, dont le lien avec l’Esprit, avec la Source est devenu de plus en plus ténu. Ce furent les Âges d’Argent et de Bronze. Puis la rupture se produisant d’avec le ciel, cet homme encore spirituel s’est dégradé en l’homme matériel qui peuple la Ninive d’aujourd’hui au cours de l’Âge de Fer que nous connaissons, ce peuple voué au seul raisonnement de sa logique.


Il y a bien longtemps que les hébreux ont compris que l’âme était multidimensionnelle, elle est de l’ordre de l’infini. Dans le règne humain en cette fin de cycle, elle est énergie brute, cette essence vitale que les animaux possèdent aussi. Elle est pleine des pulsions de violence qui coulent dans le sang, c’est Nephesh. A ce niveau, l’âme est encore en sommeil. C’est la catégorie de “la pensée inapte”… (4) »

Rouac’Ë, le Souffle, le Vent, est le deuxième niveau de l’âme, son principe spirituel. Là se met en place le langage ; la parole prononcée l’est par le diaphragme ouvert au service du cœur. Les voyelles (5) - ce mot veut dire mouvement -, qui ne s’écrivent pas en hébreu, sont de l’ordre de l’âme, et les consonnes de l’ordre du corps. Seuls ceux qui connaissent le mot par leur âme, peuvent lire les consonnes écrites par la main, ce qui donne d’un même texte des lectures différentes !

La dimension Neshamah est celle de l’Âme la plus spiritualisée ; « elle est celle de l’illumination des “esprits”. (6) ». Seuls les justes permettent à ce niveau de naître au monde de l’inaudible, de l’invisible aux sens. C’est l’accès au monde d’en haut, à la dimension cosmique de la vie.

         Les quatre éléments terrestres multipliés par ces trois niveaux de l’âme nous donnent les douze signes du zodiaque, les douze fils de Jacob, les douze apôtres du Christ, les douze possibilités de l’être humain sur terre (7), etc.

         Dans Ninive, dans le monde actuel,“il y a une multiplication de douze myriades d’Adam, qui ne connaît pas sa droite de sa gauche, ainsi qu’une foule d’animaux !”.

         Myriade, dans les anciens textes, signifie non pas une quantité précise, mais une immensité que l’on ne peut chiffrer. C’est donc le déploiement indéfini du douze qui est évoqué dans douze mille, par le vide des trois zéros, les trois plans de l’être humain. Et l’on ne parle pas seulement des petits enfants qui ne distingue pas encore leur droite de leur gauche comme le croient certains traducteurs, mais de toute la myriade d’humains qui ne sont plus équilibrés, qui ne savent plus discerner ce qui est encore de leur nature célestielle et les aspects les plus dégénérés, les plus horribles qui font d’eux des monstres humains vivant dans une bestialité qui peut d’ailleurs être apparemment très raffinée et prendre le masque de l’intelligence. Ils ne distinguent plus leur nature authentique de la contre-nature qu’ils ont créé et qui induit les abominations actuelles. Ils sont devenus bêtes et c’est pourquoi il est parlé d’une foule d’animaux.

          Mais voilà que s’opère le Retournement…

 

         Jonas, lui, est maintenant dans la toute compréhension… Dans le nom Jonas, le J indique l’homme tourné vers le passé. Voilà pourquoi le nom véridique est Yônah : l’androgyne (Y) ayant retrouvé sa totalité d’être (O) par le Principe (^) déploie (N) la manifestation (A) de l’esprit (H), décrypte la Langue alchimique des Oiseaux (7).

        Il typifie alors l’Homme Parfait, Célestiel, un et multiple… dont on ne peut rien dire avec les mots des langues terrestres.

  


1 Virya, Le Grand Oeuvre de Jonas, 1996, G. Lahy.
René Guénon, Le Roi du Monde, Gallimard, 1958, pp. 60,puis 65 et. 64-65
3  D’I-Eu ; D’I-A-Ble, voir Emmanuel-Yves Monin, Hiéroglyphe Français et Langue des Oiseaux, Point d'Eau, 1982. Et http://langue.des.oiseaux.free.fr/
4
 Dov Baer de Loubavitch, Lettre aux hassidim sur l’Extase, Fayard, 1975, p. 73.

Voyelle : Voix et Voie de El nous dit la Langue des Oiseaux. Voir note 2.

Dov Baer de Loubavitch, Lettre aux hassidim sur l’Extase, Fayard, 1975, p. 73.

7 Voir : Emmanuel-Yves Monin, L’Univers en code-barres. Dodécalogie et transdisciplinarité, 1998,Y. Monin.

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